Avant-propos
Stephen O’Brien, Secrétaire général des Nations Unies aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence
Les besoins humanitaires dans le monde ont atteint un niveau sans précédent. Depuis janvier 2017, le nombre de personnes ayant besoin d’assistance humanitaire est augmenté de 12,5 millions passant à 141,1 millions de personnes dans 37 pays. Sur ce nombre, les Nations Unies et leurs partenaires ont priorisé les 101,2 millions de personnes les plus vulnérables pour recevoir une assistance. Un total de 23,5 milliards de dollars est nécessaire pour répondre à leurs besoins en 2017, un montant affichant une augmentation de 5,7 % depuis janvier. L’appel mondial est financé à hauteur de 6,2 milliards de dollars actuellement. La dure réalité est qu’en 2007, ce montant aurait suffi à couvrir l’intégralité de l’appel des plans de réponse coordonnés par les Nations Unies ; mais en 2017, il ne couvre que 26 % des besoins en cours.
Cette année a été marquée par de multiples catastrophes et crises prolongées qui engendrent la plupart des besoins humanitaires. La famine a été déclarée dans deux comtés de l’État d’Unité au Soudan du Sud et jusqu’à 20 millions de personnes sont exposées à un risque de famine dans le nord-est du Nigeria, en Somalie, au Soudan du Sud et au Yémen. Cinq Appels Éclairs ont été lancés en 2017 en réponse à la dévastation causée par la sécheresse an Kenya, par les cyclones tropicaux Enawo à Madagascar et Dineo au Mozambique et par des inondations au Pérou. L’escalade de la violence dans la province du Kasaï en République démocratique du Congo a aussi donné lieu à un Appel Éclair. L’absence de solutions politiques au conflit au Soudan du Sud, en Syrie et au Yémen ainsi que les opérations militaires en Irak, en Afghanistan et ailleurs exposent les civils à d’intenses souffrances.
Intervenant avec rapidité face à ces terribles défis, les partenaires humanitaires ont accru la fourniture d’assistance dans des environnements difficiles et souvent dangereux. L’insécurité, les obstacles, le refus et les périls posés à l’accès humanitaire continuent de saper la dispense de l’aide. Malgré les nombreux défis, les humanitaires continuent de fournir des niveaux sans précédent d’aide vitale.
Les pages de ce document contiennent de nombreux exemples de personnes ayant reçu une aide cette année. Pour n’en citer que quelques-uns – les partenaires humanitaires ont dispensé à 5,8 millions de personnes au Yémen une forme d’assistance cette année et ils continuent de fournir une assistance prolongée à au moins 3 millions de personnes chaque mois. Au Soudan du Sud, plus de 3 millions de personnes ont reçu une aide vitale. Plus de 2,7 millions de personnes en Somalie et 2,2 millions de personnes affectées par la crise en Syrie ont reçu une assistance alimentaire en 2017. Dans le nord-est du Nigeria, plus de 2,3 millions de personnes ont bénéficié d’une assistance alimentaire d’urgence et d’un soutien à leurs moyens de subsistance. Des transferts monétaires ont été fournis pour l’achat de nourriture à 27 991 réfugiés burundais en République démocratique du Congo. Plus d’un million de personnes au Soudan du Sud ont eu accès à une eau saine et plus d’un million de personnes à une eau salubre en Somalie. Au moins 750 000 personnes dans le nord-est du Nigeria ont bénéficié d’une assistance en eau, en assainissement et en hygiène. Quelque 700 000 personnes en République centrafricaine ont aujourd’hui accès à des sources d’eau de meilleure qualité. Plus de 807 000 personnes en Haïti ont été vaccinées contre le choléra.
La réponse a été rendue possible grâce au soutien généreux et indéfectible de nos donateurs qui ont permis aux organisations humanitaires de fournir à des millions de personnes une assistance vitale et, dans de nombreux cas, une protection. Depuis le début de l’année, trois conférences de haut niveau ont été organisées pour les annonces de contributions : à Bruxelles pour la Syrie et la région, à Oslo pour le Nigeria et la région du Lac Tchad et à Genève pour le Yémen. Ces événements avaient pour but de réduire et combler le déficit de financement pour ces trois situations d’urgence majeures.
Les Nations Unies et leurs partenaires restent pleinement mobilisés pour fournir une aide coordonnée et efficace aux personnes affectées dans les 37 pays couverts par les plans de réponse humanitaire. Les besoins sont immenses. Une fois encore, j’en appelle à la communauté internationale pour obtenir suffisamment de ressources pour permettre aux organisations d’aide de répondre aux besoins humanitaires décrits dans ces plans. Les plans coordonnés par les Nations Unies sont calculés et priorisés sur la base d’une évaluation et d’une analyse conjointes et approfondies des besoins pour garantir que la totalité du montant demandé soit fermement destinée à répondre à des besoins tangibles. Cette approche a pour effet de faire du financement de ces plans de réponse, un placement sûr, fiable et à fort impact.
Les Nations Unies et leurs partenaires continuent à préconiser un financement non-affecté, notamment à travers les fonds communs - le Fonds central d’intervention d’urgence (CERF) et les Fonds de financement commun pour les pays (CBPF) - autorisant une intervention souple et opportune. Le CERF est un des moyens les plus rapides pour les Nations Unies et leurs partenaires de démarrer, augmenter ou maintenir une assistance vitale en situation de crise. De même, les CBPF sont les meilleurs instruments d’accès à un financement pour les intervenants de première ligne, notamment les organisations non-gouvernementales (ONG) nationales et locales. Ces deux catégories de fonds assurent la priorisation du financement au niveau local et sa totale correspondance aux besoins.
Dans l’esprit du Programme d’action pour l’humanité, nous ne devons pas seulement étendre nos modalités de financement mais aussi les moderniser. Cette démarche signifie une maximisation des complémentarités entre les efforts humanitaires et les efforts de développement. A l’heure actuelle, les plans humanitaires et de développement couvrent la planification de services sociaux et la résilience. En réorientant notre action de manière à englober la planification immédiate et à plus long terme des services sociaux et la résilience, par exemple, les organisations humanitaires et de développement pourront gagner en efficacité. La planification des crises prolongées est déjà en pleine évolution car, dans de nombreux cas, une approche d’une année sur l’autre n’est plus viable. La planification et la programmation pluriannuelles, soutenues par un financement pluriannuel sont en passe de devenir une nouvelle norme pour les crises prolongées comme celles de la République centrafricaine et de la République démocratique du Congo.
Au nom de toutes les organisations humanitaires intervenant dans les plans coordonnés par les Nations Unies, j’adresse mes remerciements à ceux qui apportent un soutien essentiel. Outre les organismes donateurs des gouvernements et l’engagement plus récent de la Banque mondiale, j’appelle et encourage les institutions financières, les parlements et d’autres acteurs à jouer un rôle croissant dans le financement de la réponse humanitaire telle qu’envisagée dans la « Nouvelle manière de travailler ».
Ensemble, nous pouvons continuer à faire changer les choses – et avec même un plus fort impact – dans le monde complexe dans lequel nous nous trouvons.